Sport adapté dans "20 minutes"

par LSA IDF / 31 août 2023 à 09:18 Mise à jour 31 août 2023 à 09:34
  • C'est paru dans la presse : Article de "20 minutes " 

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  • Jeux paralympiques de Paris 2024 : Le sport adapté, le mal-aimé de la famille para ?

    HANDICAP Pour l’édition dans la capitale française qui débutera dans un an tout pile, les épreuves réservées aux sportifs avec déficience intellectuelle ne devraient représenter qu’environ 2 % des médailles possibles

188 médailles dont 87 en or. C’est le résultat éclatant de la France victorieuse du classement, lors de la 6e édition des Virtus Global Games, à Vichy en juin, le mondial du sport adapté, dédié aux sportifs avec un handicap mental ou psychique. Pourtant, pour les Jeux paralympiques de Paris en 2024, qui débuteront dans un an pile, aucune chance que les sportifs déficients intellectuels tiennent l’équipe de France à bout de bras : sur les quelque 300 sportifs qui devraient obtenir leur sélection, seuls 7 ou 8 viendront du sport adapté. Il faut dire que les épreuves sont très limitées : athlétisme, natation et tennis de table sont les seuls sports ouverts pour un total de dix épreuves. Soit à peine 2 % de la totalité des 549 épreuves. « C’est vraiment très peu quand on sait que c’est le handicap le plus présent dans le monde », souffle Marc Truffaut, président de la Fédération française de sport adapté (FFSA). Mais un handicap aussi régulièrement invisible et donc plus difficile à déceler.

Pourquoi alors le sport adapté a-t-il si peu de place dans la famille paralympique ? Quelle est l’origine de ces quelques miettes laissées à des sportifs qui s’entraînent tous les jours et sont inscrits sur les listes fédérales des athlètes de haut niveau ? Il faut rembobiner jusqu’aux Jeux de Sydney en 2000, 2e édition où le sport adapté avait ses entrées dans le programme paralympique après Atlanta en 1996 et de Nagano en 1998, et raconter une affaire, qui a entaché profondément l’histoire et jeté l’opprobre sur plusieurs générations de sportifs déficients mentaux. « Oui, les basketteurs espagnols ont triché. Mais c’est comme si un coureur cycliste se dopait et qu’en réaction, on disait : on arrête le cyclisme », résume Marc Truffaut.

La triche des basketteurs espagnols et ses conséquences

A Sydney, le basket pour déficients mentaux est une épreuve des Paralympiques, et en 2000, c’est l’équipe espagnole qui remporte le titre le 24 octobre face à la Russie. Mais comme le raconte Fabrice Drouelle, dans un épisode d’« Affaire sensible » sur France Inter, dix des douze basketteurs espagnols n’étaient pas handicapés. Et la fédération espagnole était au courant. Quand la supercherie est découverte, toute l’équipe doit rendre sa médaille d’or, y compris Ramon Torres et Juan Antonio Pareja, les deux seuls basketteurs de l’équipe réellement déficients mentaux.

Mais le scandale éclabousse plus loin que le seul terrain du basket adapté. Dans la foulée des Jeux de Sydney, le Comité international paralympique (IPC) décide de bannir tout simplement tous les athlètes déficients mentaux des prochains JO. Ainsi, en raison d’une difficulté trop importante à déterminer le niveau de handicap des athlètes déficients intellectuels, ils ne sont tous simplement pas inclus pour les Jeux de 2004 à Athènes.

La réintégration aux Jeux de Londres

Pendant près de dix ans, ces sportifs sont donc persona non grata dans la grande famille de l’olympisme et du paralympisme mondial. « C’est à ce moment que les Virtus Global Games ont été créés, précise Marc Truffaut, pour remédier à l’absence de grande compétition internationale pour le sport adapté ». La première édition s’est déroulée, en effet, en Suède, en 2004.

Puis, en 2009, l’IPC, rassemblé en assemblée générale, décide de réintégrer les déficients intellectuels aux Jeux paralympiques. Ils reviennent donc pour l’édition de Londres en 2012, dans trois disciplines : athlétisme, natation et tennis de table. C’est peu. « La raison est simple : le handisport a pris des places vacantes en l’absence du sport adapté des Paralympiques, explique Marc Truffaut. Il n’y a pas de polémique, c’est dans la logique des choses ». Pourquoi ne pas en créer des supplémentaires ?

Un numerus clausus très contraignant

En fait, le nombre d’athlètes participants aux Jeux est très normé, et fixé par le CIO. « Pour les valides, on est à un peu plus de 10.000. Pour les paras, on était à 4.200 et on va passer à 4.400 à Paris, rappelle le président de la FFSA. Comme il ne peut augmenter de façon exponentielle, pour des raisons économiques et logistiques notamment, si on ajoute des épreuves de sport adapté, il faut retirer une autre catégorie ». Au risque de se retrouver avec des épreuves avec seulement trois à quatre concurrents.

Sans parler de l’unique classe pour le handicap mental à la différence des Virtus Global Games où il y en a trois : déficients intellectuels, déficients intellectuels avec un surhandicap, ce qui permet aux personnes trisomiques principalement d’avoir une compétition mondiale, et autistes. En athlétisme aux Paralympiques, pour les sportifs avec un handicap visuel, il existe trois catégories, 11, 12 et 13 qui vont des malvoyants aux aveugles complets. « C’est un de nos combats aujourd’hui, ouvrir une deuxième classe pour le handicap mental, car, à l’heure actuelle, un trisomique aujourd’hui n’a aucune chance de participer aux Jeux paralympiques », précise Marc Truffaut.

Encore des tabous autour de ce handicap

Sans parler de tabou, le président de la FFSA reconnaît que le chemin est long et qu’il subsiste une certaine stigmatisation envers ces sportifs. « Pour les Jeux d’hiver, ce n’est pas un problème de places, tous les quotas ne sont pas remplis, mais bien une volonté politique. La Fédération internationale de ski (FIS) s’oppose à la réintégration du sport adapté et l’a encore réaffirmé il y a peu ». Or, s’il admet que le scandale des Jeux de Sydney a aussi permis de mettre en lumière des problèmes dans le système de classification et les tests, « aujourd’hui tout est prêt et fiable pour participer aux Jeux de 2026 à Cortina ».

Pour rappel, les athlètes déficients intellectuels sont soumis à deux étapes pour vérifier leur niveau de handicap. La première est la détection d’un QI inférieur à 75, détecté avant l’âge de 22 ans, accompagné de tests démontrant des besoins d’accompagnement et d’adaptation dans la vie de tous les jours. Ensuite, pour se qualifier, ils doivent se soumettre à la classification, qui doit démontrer que la déficience intellectuelle a bel et bien un impact sur la pratique sportive. « Les tests sont faits plusieurs fois, ils sont très normés. La triche, c’est du passé », martèle Marc Truffaut. Comme pour le cyclisme ? 

                                  

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