Tara Leroux ou l'amour de l'aviron

par LSA IDF / 11 janv. 2025 à 08:09 Mise à jour 11 janv. 2025 à 09:10

Etudes et sport de haut niveau pour la rameuse de Boulogne-Billancourt 

Tara Leroux une femme à la pointe de l'action

(Vice-championne d'Angleterre en 4)

A 22 ans, la jeune rameuse de Boulogne 92 multiple les projets de vie en alliant études supérieures et sa passion de l'aviron. Avec le sourire mais aussi une forte détermination, cette sportive qui vient également de se lancer dans le triathlon, nous emmène en bateau pour nous faire ressentir cette douce sensation de la glisse sur l'eau.

Avant de parler sport, comment se sont passées les fêtes ?
Très bien, je suis partie en stage d'aviron quatre jours avec trois séances par jour. Cela m'a fait le plus grand bien, après les fêtes en famille où j’ai pu me reposer un peu.
Comment est née cette passion pour l'aviron ?
Mon papa a emménagé proche d’un club lorsque j’étais jeune, j’ai toujours vu les bateaux passer devant chez moi… Je suis sportive depuis toute gosse avec de la gym, de l'équitation puis de l'aviron par le biais de la Société Nautique de la Haute-Seine à Draveil et Boulogne 92, club auquel je suis rattachée par le biais de mes études à HEC. Après une année d'aviron Universitaire, le sport faisant partie du cursus obligatoire pour mes études, je me suis licenciée. D’abord à la Haute-Seine, où j’ai appris le skiff, puis à Boulogne.  
Vous avez intégré quel type de bateau ?
J'ai déjà été remplaçante dans le 8 de pointe, avant de l'intégrer après une première expérience enrichissante en deux de couple féminin avec une finale B universitaire. La deuxième année en 8 nous avons réussi avec l'équipe féminine à décrocher le bronze au championnat de France universitaire, la première médaille depuis assez longtemps pour notre grande école.
Plutôt rameuse de pointe ou en couple ?
Plutôt en pointe avec une seule rame où je suis plus à l'aise, mais pour moi l'important est de monter dans le bateau et d'appartenir à une entité, une équipe pour faire corps.
L'aviron demande à votre niveau national un entraînement régulier ?
(Sourire) Oui, environ de 8 à 11 séances par semaine et 4 ou 5 sorties en bateau, de l'ergomètre jusqu'à 10-12 bornes lorsqu’on ne peut pas sortir en bateau, puis de l'entretien physique avec musculation, étirements à raison de 2 ou 3 séances.
(Tara aime aussi le skiff)
Pas le temps Tara de se lancer dans une autre aventure sportive ?
(Amusée) Mais si quand on a envie. Je viens de disputer mon premier triathlon court à la Baule en septembre. Une expérience unique même si j'ai été logiquement anxieuse pour l'épreuve de natation.
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" Je tente de vivre les choses à 100% "

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Le départ a été dur ?
Disons que la natation est similaire à une entrée dans une machine à laver. On ne peut poser sa nage, c'est un combat pour se faire une place dans le peloton, pour éviter les coups, les chocs avec quelques difficultés à respirer dans cette masse où il ne faut pas paniquer.
Existe-t-il un moyen pour ne pas prendre le bouillon ?
(Rire) Oui, partir doucement, dans les derniers comme j'ai fait, tranquille. Après il a fallu remonter le peloton, pas une chose aisée mais cela se décante naturellement. Je suis remontée dans le milieu du peloton, j'ai ensuite fait une belle partie vélo en continuant de remonter pour finir sur une course plus faible car musculairement j'ai marqué le pas. Je termine 14ème senior femme.
Impressionnant pour une première non ?
Il faut relativiser, c'était un triathlon populaire extra court mais j'étais très contente tout de même. A priori, notamment sur la course à pied, j’ai un profil supérieur en endurance donc je devrais être bien plus à l'aise sur grande distance, c’est en projet.
On a l'impression que vous avez un caractère qui vous permet de vous épanouir en vous donnant à fond?
(Long silence) Je pense que je vis les choses à 100% en étant vraiment dedans. Mon implication est forte et lorsqu'il y a réussite c'est le bonheur total.
Et en cas d'échec ?
J'ai moins de bonheur (sourire) mais cela me donne aussi des clés pour recommencer et rebondir, ce qui est bien aussi. Je tiens cet esprit tenace de la gym, que je pratiquais à un bon niveau.
L'aviron a la particularité de partager les joies de la pratique …
Oui ! Même si en championnat universitaire la concurrence est rude… à 8 dans un bateau et avec le barreur on trouve des solutions, il y a une énergie commune. Parfois il y a un truc qui se passe avec une sensation de glisse incroyable. Et même en cas de contreperformance… Certains jours, c'est plus compliqué, mais avoir le sens du collectif, cela motive.
(Un sport où il faut aller au bout de l'effort) 
Votre gabarit peut-il être un handicap dans ce sport très athlétique ?
Disons que mon petit mètre 61 sous la toise me fait manquer un peu de longueur au niveau des segments mais je fais tout pour compenser en souplesse, en dynamique et en puissance.
Allez, quelle a été votre plus belle sensation de glisse ?
Cet été sur la Tamise à 6 h du matin, en 8 féminin, avec cet équilibre du bateau qui glisse et ce temps qui s'arrête. On sent le souffle de chacune des rameuses, la puissance, l’intensité dans l’eau, et puis d’un coup le silence, lors de l’espace suspendu de la récupération. Quelle pureté de sentir qu’à chaque coup, le temps s'arrête pour quelques secondes, avant de reprendre pour le coup suivant. C'est impressionnant, une sorte de libération. J'ai aussi connu cela en deux sans barreur avec un bateau parfaitement équilibré. La complicité que nous avions avec ma partenaire pour faire tenir ce bateau… C'était juste beau.
La concentration est une donnée qui est liée à votre vie ?
Je sens que j'arrive à mieux comprendre ce décalage, comment je fonctionne, comment je dois gérer la fatigue. Je concilie de mieux en mieux les études et le sport, tout en étant performante dans les deux, moi qui rencontrais des difficultés de concentration plus jeune. Parfois, je sens un peu plus les choses que les autres en étant concentrée, je ressens qu’on peut faire corps avec le bateau. On se déplace ensemble, on partage ensemble, c'est beau.  
L'aviron est aussi une forme de quiétude intérieure sur l'eau ?
J'aime ce silence, de ce bateau qui file, en suspension. C'est très répétitif et technique car chaque coup compte. Il y en a des bons et des moins bons, il faut réajuster, se concentrer, se reprendre en donnant le maximum. J'ai une énergie débordante à faire sortir et l'aviron me permet de me dépenser, travailler ma concentration qui est un tremplin pour mes études. Un coup après l'autre. Je suis en phase dans le bateau, c’est là où je dois être. Finalement j'adore l'entraînement, j’y prends beaucoup de plaisir, même si en compétition il faut s'arracher quelques minutes en allant au bout de la douleur car cela fait mal aussi…
À quand remonte votre dernière peur ou frayeur ?
En skiff où j'ai heurté un bout de bois je pense et je suis allée au jus pour un bain forcé. Je n'ai pas réussi à remonter sur le bateau et on est venu me chercher. J'ai refait mes gammes dans un bassin. C'était particulièrement stressant cette situation, mais bon cela arrive au moins une fois à tous les rameurs.
Quel est votre volume d'entraînement par semaine ?
Assez important entre 13 et 20 h, mais avec aussi beaucoup de travail pour la prévention des blessures. L’avantage de l’entraînement à basse intensité, très important pour l’aviron, c’est que je peux en profiter pour réviser mes cours lors des séances de vélo à l'intérieur.
Comment récupérez-vous physiquement et mentalement de cet agenda bien chargé ?
Il y a une certaine fatigue physique et mentale, en rentrant chez moi je fais un break de 30 minutes à une heure, où je respecte des notions de décontraction et de silence aussi.
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" Mon temps est bien rempli " 

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Pas beaucoup de temps libre en dehors de votre vie rythmée et endiablée ?
Non c'est vrai, le temps est bien rempli. J'aime toutefois lire et faire de la pâtisserie en testant des associations de saveurs. Je n'oublie pas mes études. C'est difficile mais là aussi je m'accroche avec un aménagement salutaire dans mon emploi du temps. A la sortie de mes études, j'aimerai travailler dans les institutions internationales.
Quelles sont les prochaines échéances sportives ?
Fin janvier, les championnats de France indoor, sur ergomètre. Puis la saison bateau, particulièrement longue qui va durer de février à octobre : d’abord la saison de la Fédération Française d’Aviron, puis la saison universitaire, et enfin les prochains Championnats en bateau du sport adapté. Je travaille sur les trois types de Championnats puisqu’ils restent assez complémentaires, même si les distances ne sont pas les mêmes.
(Propos recueillis par Pascal Pioppi)
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En bref 
(Lors de la Remise des Champions à l'Assemblée nationale en décembre avec son président de club) 
Âge : 22 ans
Habite à Palaiseau
Sports pratiqués : gym, équitation, aviron
Club : Boulogne-Billancourt
Études : double projet : HEC Paris, ENSAE Paris (École Nationale de la Statistique et de l'Administration Économique).
Palmarès : En gym, 2e du CF avec Bussy-St-Antoine, en aviron : 2 titres nationaux indoor sur 500 et 1000 m, titre national en skiff, bronze au championnat de France universitaire en huit, 3e double mixte avec Damien Touchagues, vainqueur en skiff adapté en Grande-Bretagne.


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